Ecouter à l’intérieur et se transformer

écoute intérieur se transformer

Comment est-ce que je me sens ? Voici une question à se poser plusieurs fois par jour. Pour ma part, si je me tourne vers mon corps, je note de l’excitation joyeuse en lien avec le partage que je m’apprête à vous faire, une légère pression aussi à trouver les « bons » mots, ceux qui pourraient contribuer.

C’est un fait : je peux difficilement choisir de ressentir telle ou telle sensation, telle ou telle émotion, elles émergent et sont ma réalité brute du moment. Je ne peux pas non plus ni choisir ni deviner quelle sera ma prochaine pensée (essayer pour voir). Mais je peux agir sur ma posture intérieure : comment je suis avec comment je me sens.

Mettre de la conscience. Si je ressens de la peur à un moment donné, je commence par prendre conscience que cette peur n’est pas là tout le temps, ce sentiment de tension dans ma poitrine en lien avec la peur va et vient. Je note ce qui contribue à le réveiller – passer trop de temps à écouter/lire l’actualité – et ce qui m’aide à me sentir mieux – faire un tour dans le jardin, me plonger dans un nouveau livre ou échanger avec mon ami. Je peux choisir de faire plus de certaines choses qui vont contribuer à mon bien-être et moins des autres choses.

Se tourner vers le corps. Tout ce que je vis résonne en moi avec sa note particulière que je peux ressentir corporellement. Si je me sens anxieuse, mon corps manifeste le vécu de la situation. Alors quand mon corps m’envoie des signes forts en lien avec cette anxiété, je sais qu’il appelle ainsi mon attention. Je fais une pause et j’écoute. Je tourne mon attention vers l’espace corporel. Je pose une main là où le ressenti se manifeste (pour moi c’est souvent comme un resserrement dans la poitrine, mais ça dépend de la peur en question) et je me dis « il y a quelque chose en moi qui a peur » – même si j’ai l’impression que c’est tout moi qui a peur à cet instant. Et je prends un peu de temps pour respirer avec ce quelque chose en moi qui a peur. Et déjà ça aide. Voir sa peur, l’entendre, la sentir, dans la sécurité de la présence.

Percevoir ce qui se passe en moi et accueillir avec bienveillance ce que je vis. La main posée sur l’endroit du corps où s’est éveillée la sensation, je lui fais de la place. Je me rends perceptif et réceptif à ce qui se fait sentir. Il y a un apprentissage à « simplement sentir » sans laisser le mental prendre le dessus. La pratique du yoga contribue à cet apprentissage. Je peux même laisser le mot « peur » de côté (très chargé de tout en tas de représentations) et simplement rester avec l’énergie brute de cette sensation, de ce « quelque chose en moi » que j’ai perçu, qui a attiré mon attention. Je peux juste toucher ce qui se vit de l’intérieur sans y ajouter de commentaires, sans essayer de réparer, de guérir ni de chasser. Faire de la place à cette sensation, respirer en elle, lui accorder de l’attention. Simplement, comme une expérience. Rester à l’endroit que je fuis habituellement, pour quelques secondes, instant après instant. Et puis faire autre chose pour prendre soin de moi. Et revenir plus tard, quand je suis prêt. Mais je ne peux pas brûler les étapes ! Je ne peux pas être directement dans l’acceptation, la bienveillance, l’amour depuis un endroit qui se sent en insécurité. C’est important de se rappeler cela et d’honorer où nous en sommes, de respecter notre rythme.

Rencontrer sa limite dans une attitude de « curiosité » pour explorer ce territoire inconnu en douceur et avec compassion. Se pousser juste un peu, suffisamment, pour faire face et rester auprès ces endroits sombres et effrayants, mais pas trop pour ne pas se sentir écrasé ou submergé.

Accueillir ce qui surgit demande une profonde confiance dans le processus (et nécessite parfois d’être accompagné sur les endroits de grande vulnérabilité). Ce qui est inconfortable voire douloureux ne va pas me détruire. Si je le perçois en moi, c’est que je suis plus vaste que cette sensation inconfortable. En l’accueillant avec bienveillance, je lui permets d’être ressourcée par la sagesse de l’organisme (il arrive qu’elle ait des messages à me transmettre si je sais l’écouter). Elle peut être là mais ne m’empêche plus d’agir parce que je suis capable de l’accompagner lorsqu’elle se manifeste. Elle peut même devenir une alliée mais ne me contrôle plus.

La pratique du yoga contribue de ce travail intérieur, parce qu’elle me confronte à ma « limite » et m’invite à sortir de ma zone de confort pour aller dans l’inconnu. Nos limites s’explorent, qu’elles soient physiques (sous forme de tensions, contractions), émotionnelles (sous forme d’une peur ou d’une autre émotion qui instantanément m’oblige à sortir de la posture) ou mentales (par exemple lorsqu’on pense qu’on ne pourra pas « tenir » plus longtemps ou aller plus loin), ou un peu tout ça à la fois… elles s’explorent posture après posture, souffle après souffle, séance après séance. S’ouvre alors progressivement un champ de vie plus vaste.

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